top of page

Histoire de mot : matrimoine

Dernière mise à jour : 7 mars 2022

Le matrimoine n'est pas un néologisme, ni une erreur de langage. Au Moyen-Âge, lorsqu'un couple se marie, sont déclaré.es à la fois le patrimoine (les biens hérités du père) et le matrimoine (les biens hérités de la mère). Le 17ème siècle marque le début de l'invisibilisation des mots au féminin qui expriment la présence des femmes en tant qu'actrices de la société. Ainsi, le champ lexical du mot matrimoine s’est progressivement réduit pour se présenter uniquement sous la forme de l’adjectif matrimonial (ce qui concerne le mariage : convenances, coutumes, règles; projets, rêves matrimoniaux). En parallèle, le sens et le rayonnement du mot patrimoine n’a cessé d’augmenter pour finir par englober le matrimoine et désigner plus largement les biens d'une nation toute entière. Le mot matrimoine refait surface en 1967, dans le titre d’un roman de l’écrivain et romancier français Hervé Bazin, Le matrimoine, présenté comme le pendant de patrimoine. En 2000, le chercheur et psychanalyste Amine Azar définit le matrimoine comme « des manières de dire et des manières de faire transmises en lignée féminine par des voies fort variées ». En 2002, l'ethnologue Ellen Hertz retrace avec précision l'origine ainsi que l'évolution du mot matrimoine, et en conclut que « l'histoire de son existence suivie de celle de son effacement révèle tout un programme » et suggère « que l'élargissement du champ sémantique de patrimoine ne fut possible qu'à la condition d'une diminution concomitante de celui de matrimoine ». Depuis, les voix sont nombreuses pour revendiquer la réintroduction du mot matrimoine dans toutes les sphères langagières. Sources et références : Alain Rey, Marianne Tomi, Tristan Hordé, Chantal Tanet, Dictionnaire historique de la langue française, éditions Dictionnaires Le Robert, 1994 Frédéric Godefroy, Dictionnaire de l’ancienne langue française et de tous ses dialectes du ixe au xve siècle, Paris, F. Vieweg, 1881-1902 Agnès de Féo, « Pourquoi on n'a aucun mal à dire coiffeuse et beaucoup plus à dire professeuse », Slate,‎ 1er fév. 2018 Ronan Tésorière et Marie-Anne Gairaud, « Le Conseil de Paris va étudier « la dénomination Journées du Matrimoine et du Patrimoine » , Le Parisien,‎ 23 nov. 2017 Aurore Évain, « Vous avez dit matrimoine ? », Blog Mediapart,‎ 25 nov. 2017 Amine A. Azar, « La crise du matrimoine en France au détours du xvie siècle », Ashtaroût,‎ sept. 2000 Ellen Hertz, « Le Matrimoine », Musée d'ethnographie de Neuchâtel,‎ 2002. Geneviève Ruiz, « Non, “matrimoine” n’est pas un néologisme », Hémisphères, revue suisse de la recherche et de ses applications, no 18,‎ 2020

41 vues0 commentaire

Posts récents

Voir tout
bottom of page