Arlene Hannah Butter est née le 7 mars 1940 à New York, aux États-Unis. Elle fait des études en arts et sciences de l’éducation à l’Université Temple de Philadelphie et travaille à titre de professeure d’art, puis de sculpture, en parallèle à une carrière d’artiste.
À la fin des années 1960, Hannah Wilke expose des sculptures de vulves en terre cuite. Elles deviennent à la fois un emblème du mouvement féministe américain Women’s Lib et un élément central de l’œuvre de l’artiste. Tout au long de sa carrière, Hannah Wilke abordera la vulve sous différents angles en variant les matières de création, les couleurs et les formats qu’elle utilise.
En 1974, l’artiste débute sa série S.O.S. (Starification Object Series), une œuvre photographique de body art. Dans le cadre de ce projet, elle sculpte de petites vulves en gomme à mâcher qu’elle colle sur son corps pour ensuite réaliser des autoportraits où elle prend différentes poses de pin-up archétypales. Le but de sa démarche est de juxtaposer le glamour et le tribal et de s’interroger sur la place des corps féminins dans l’espace public, notamment en ce qui a trait à la sexualisation des seins et l’invisibilisation des vulves.
À partir de ce travail, elle crée une installation de cinquante autoportraits qui sont présentés comme un jeu. L’expo se nomme S.O.S. Starification Object Series: An Adult Game of Mastication (1974-1975) et est aujourd’hui détenue par le Centre Pompidou à Paris.
Lors d’une performance donnée dans la capitale française en 1975, Hannah Wilke demande à l’auditoire de mâcher lui-même la gomme que l’artiste utilise pour réaliser différentes sculptures in situ, entre autres une vulve faite de plusieurs couches de gommes.
Tout au long de sa carrière, Hannah Wilke conçoit et réalise des performances qui mettent le corps de la femme au centre de ses créations et dont les titres sont révélateurs : Gestures (1974), Hello Boys (1975), Intercourse with… (installation audio, 1974–1976), Intercourse with… (installation vidéo, 1976) et Hannah Wilke Through the Large Glass, qui est présentée au Philadelphia Museum of Art en 1977.
Après une vie dédiée à la création et l’enseignement, Hannah Wilke décède d’un lymphome en 1993. Sa dernière œuvre, Intra-Venus (1992-1993), est diffusée à titre posthume. Elle prend la forme d’un journal ou compte-rendu photographique qui retrace la transformation du corps impacté par la maladie, les traitements de chimiothérapie et les opérations, notamment un transfert de moelle osseuse, que traverse l’artiste. L’ensemble permet de voir l’évolution de son corps de femme en santé et sexué vers un autre, abîmé et dépouillé de toute désirabilité. L’œuvre globale comprend aussi une série d’aquarelles et de dessins. Elle est présentée après la mort de l’artiste, à sa demande et suivant ses indications, entre autres dans le but de parler de l’invisibilité des corps malades dans l’espace public.
La vie et l’œuvre d’Hannah Wilke sont également essentielles afin de parler d’un sujet affectant directement les artistes qui s’identifient en tant que femmes, à savoir la tendance à considérer comme moindre le travail des créatrices qui utilisent leur corps et/ou leur sexe dans leur processus créatif.
Hannah Wilke, par exemple, se présente dès ses débuts comme une artiste féministe dont la démarche forte et solide est conçue à la fois pour célébrer le corps féminin et faire réfléchir aux représentations culturelles des femmes. Pourtant, les critiques d’art ont souvent souligné que son identification au mouvement d’art féminisme est problématique vue la charge sexuelle de ses autoportraits et ses performances susceptibles de provoquer le désir. On lui a d’ailleurs reproché d’être « trop belle » pour être une artiste.
Ces accusations ont été constantes tout au long de sa carrière d’artiste jusqu’à l’arrivée de sa maladie, moment charnière dans la reconnaissance de la pertinence de sa démarche en tant qu’artiste utilisant son corps comme matériel créatif. Il est difficile de croire que le corps de cette artiste femme doive être détruit et désexué pour que celle-ci soit enfin célébrée à sa juste valeur par le plus grand nombre.
Des rétrospectives de son œuvre ont été présentées à Copenhague, Helsinki et Malmö en 2000. Son travail est aussi présenté dans de nombreuses expositions collectives dédiées à l’art au féminin telles que WACK! Art and the Feminist Revolution aux États-Unis de 2007 à 2009 et elles@centrepompidou au Centre Pompidou en 2009 et 2010.
Aujourd’hui, l’héritage de l’artiste est géré par la Hannah Wilke Collection & Archive, fondée en 1999 et basée à Los Angeles depuis.
Crédit :
1. Hannah Wilke. S.O.S. Starification Object Series (Performalist Self-Portrait with Les Wollam), 1974.
2. Hannah Wilke. Untitled (Single Gum Sculpture), 1977
3. Hannah Wilke. Marxism and Art: Beware of Fascist Feminism, 1977
4. Hannah Wilke. Sweet Sleeping Mayan, 1986.
5. Hannah Wilke. Intra-Venus Series No. 11, December 11, 1992, 1991-1992
Sources :
Nancy Princenthal, Hannah Wilke, Prestel Publishing, 2010.
Écoutez l'épisode de notre balado Matrimoine Oui! Hannah Wilke x Valérie Auclair, Viva la vulva! disponible sur le site de CISM-FM et sur la plateforme d'écoute Spotify.
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